ENTRE DROITURE ET HUMILITÉ, UNE LÉCON DE VIE
Il y a des chansons qui divertissent, d’autres qui font danser, mais certaines – rares – parlent à l’âme. « Muana Nsuka » de Miyalu Kayonda appartient à cette dernière catégorie. C’est un chant profond, douloureux, et chargé de vérité, qui vient d’un homme marqué par la vie, mais encore debout, la voix vibrante, les yeux tournés vers la génération qui suit. Dans ce morceau poignant, Miyalu n’est pas dans le spectacle : il est dans le témoignage, dans l’héritage spirituel. « J’avais tout… aujourd’hui je n’ai que la vérité. » Le morceau s’ouvre sur une confession désarmante. Miyalu rappelle qu’il fut un homme puissant, entouré, envié. La richesse était entre ses mains, il en avait « trop« , selon ses propres mots.
Dans une société où le paraître est roi, Miyalu incarne l’ancien riche, aujourd’hui dépouillé, qui refuse cependant de se taire. Ce n’est pas une plainte, ni une tentative de retour sous les projecteurs : c’est une mise en garde. Car il a vu de ses propres yeux ce que beaucoup ignorent : la richesse est instable, et la vie n’a pas d’obligation de justice. Lui qui avait des moyens énormes est aujourd’hui réduit à prêcher la sagesse, non depuis un trône doré, mais depuis un sol marqué de cicatrices. Dans ce contexte, « Muana Nsuka » devient un miroir tendu à ceux qui rient aujourd’hui, qui méprisent les conseils des anciens, qui confondent l’arrogance avec la réussite. « Bo seka nga te. Nazalaka n’ango nyonso na kala. Kasi lelo? Zala motema bosawa. » (Ne vous moquez pas de moi. J’ai tout eu dans le passé. Mais aujourd’hui ? Restez humbles.)

UN PÈRE MEURTRI, UN MESSAGE VITAL
Au cœur du morceau se trouve le témoignage d’un père brisé. Miyalu révèle avec pudeur qu’il avait douze enfants. Mais le destin, sans prévenir, sans négociation, lui en a arraché dix. Une tragédie d’une ampleur indescriptible, mais qu’il livre avec une dignité bouleversante. Deux enfants lui restent : Lutumba et Kayonda. Ce sont eux – les derniers de la lignée, les porteurs de la mémoire, les héritiers de ses douleurs et de ses espoirs. À travers eux, Miyalu parle à tous les enfants du monde, à tous ceux qui restent après les tempêtes, à ceux qui ont encore la chance de faire les bons choix.
Il ne leur donne pas de fortune, il ne leur laisse pas de villas, mais il leur donne un trésor : une vérité transmise par l’expérience. Dans une société où les repères se brouillent, où les modèles se cherchent sur les réseaux sociaux, cette voix de père – grave, lente, posée – résonne comme un phare. Il ne veut pas que ses derniers enfants marchent sur les traces de la chute. Il veut qu’ils apprennent, qu’ils vivent avec intégrité, et qu’ils comprennent que la vraie richesse n’est pas dans les poches, mais dans le cœur et les choix.

UN CHANT D’ALARME, PAS UN REQUIEM MAIS UNE SAGESSE QU’ON NE DOIT IGNORER
Il serait facile de réduire « Muana Nsuka » à une lamentation nostalgique. Mais ce serait passer à côté de son courage fondamental. Car Miyalu, malgré sa douleur, ne se résigne pas. Il ne chante pas la fin, il sonne l’alerte. Il transforme la tragédie personnelle en leçon collective. Il interpelle ceux qui se croient invincibles aujourd’hui. Il rappelle que les moqueries du monde ne changent rien à la vérité de la vie. Ce n’est pas parce qu’on rit de toi que tu as tort. Et ce n’est pas parce qu’on t’applaudit que tu es dans la vérité. C’est donc une chanson pour réveiller, pas pour pleurer. Pour corriger la trajectoire avant qu’il ne soit trop tard. Elle vient de celui qui a tout perdu, mais qui n’a pas perdu le sens.
Chez FUTUMUNA, nous écoutons les battements profonds de la société. Et cette chanson nous parle. Dans un monde où les jeunes se précipitent vers la gloire sans fondation, où l’on oublie les sacrifices des générations passées, la voix de Miyalu est une pierre sur laquelle on peut bâtir. Ce n’est pas une chanson à streamer pour le rythme. C’est une chanson à méditer, à partager, à enseigner. Nous qui sommes restés, nous qui devons écouter, apprendre, et transmettre à notre tour. Miyalu Kayonda nous livre « Muana Nsuka » une chanson-testament. Elle nous rappelle que le succès sans humilité est un piège, et que la souffrance ne doit pas être vaine. Dans cette époque de vitesse, de bruit, et d’oubli, prenons le temps d’écouter ceux qui ont traversé le feu. Car au bout du compte, ceux qui écoutent vivent. Et ceux qui rient… tombent sans comprendre.