La mystique vaudou — une source de fascination et d’incompréhension

ENTRE FASCINATION ET INCOMPRÉHENSION — LE VAUDOU

« On venait furtivement nous trouver pour tenter d’assouvir d’inavouables désirs de vengeance, se libérer de haines et de rancœurs insoupçonnables et s’efforcer de faire mal par tous les moyens. » — Maryse Condé, Moi Tituba sorcière…

« Désirs de vengeance, haine et rancœur ». Ce champ lexical dépréciatif est souvent lié à une spiritualité ancestrale présente depuis la nuit des temps dans nos cultures, nos familles mais également nos traditions. Présente dans les pays d’Afrique de l’Ouest, le vaudou fait partie de l’un des principaux piliers de la spiritualité africaine. C’est cette base spirituelle qui a donné naissance à plusieurs préceptes qui sont désormais présents pour codifier et institutionnaliser le vaudou.

En fongbe, le mot « vaudou » sous-entend l’idée d’une ombre, cette ombre serait liée à la vie, mais aussi au monde après la mort. Le vaudou est présent dans un grand nombre de groupes ethniques, notamment les groupes yoruba et fon. La tradition se veut comme une quête perpétuelle d’harmonie, je parle alors d’une harmonie sur le plan social, mais également d’une harmonie entre le visible et l’invisible.

Mais alors, d’ou viendrait cette crainte du spirituel ?

OUIDAH, BENIN – JANUARY 11: Nigerian Yaruba Voodoo Spirits perform during a Voodoo ceremony on January 11, 2012 in Ouidah, Benin. Each spirit represents the reincarnation of a dead member of the Nigerian ‘Nagu’ clan. Ouidah is Benin’s Voodoo heartland, and thought to be the spiritual birthplace of Voodoo or Vodun as it known in Benin. Shrouded in mystery and often misunderstood, Voodoo was acknowledged as an official religion in Benin in 1989, and is increasing in popularity with around 17 percent of the population following it. A week of activity centred around the worship of Voodoo culminates on the 10th of January when people from across Benin as well as Togo and Nigeria decend on the town for the annual Voodoo festival. (Photo by Dan Kitwood/Getty Images)

UNE SIMPLE QUESTION D’IGNORANCE

Dans l’imaginaire collectif, la mystique s’apparente toujours à un secret qui ressortirait de l’ordre du maléfique. Etant donné qu’une grande partie des principes du vaudou sont maîtrisés par des personnes que l’on considère comme « initiées », il est difficile d’avoir des informations sur la signification de certains rituels et symboles. C’est donc à ce moment précis que l’ignorance intervient. On s’autorise donc à discuter sur la partie visible de cette tradition tout en tirant ses propres conclusions à partir de ce que l’on voit. Or c’est tout autre. Si la mystique ne peut être expliquée, c’est qu’il y a une raison. Dans cette logique, chercher à expliquer « l’inexplicable » revient à tomber dans une démarche maladroite qui est souvent présente dans l’intellect occidentale, à savoir que tout peut se justifier. Ainsi, on pense que l’on peut faire appel à la science pour expliquer le vaudou, ou alors, on la réduit à une simple religion « animiste ». C’est une prise de position complexe car dans les traditions africaines, le vaudou possède une partie scientifique.

Cette notion a, par ailleurs, été évoquée par Claude Levi-Strauss dans Race et Histoire.

« Chaque fois que nous sommes portés à qualifier une culture humaine d’inerte ou de stationnaire, nous devons donc nous demander si cet immobilisme apparent ne résulte pas de l’ignorance ou nous sommes de ses intérêts véritables, conscients ou inconscients, et si, ayant des critères différents des nôtres, cette culture n’est pas, à notre égard, victime de cette même illusion ».

OUIDAH, BÉNIN – 7 JANVIER : Les dévots dansent en état de transe lors d’une cérémonie vaudou le 7 janvier 2012 à Ouidah, Bénin. Ouidah est le cœur du vaudou du Bénin et est considéré comme le berceau spirituel du vaudou ou du vaudou comme on l’appelle au Bénin. Entouré de mystère et souvent mal compris, le vaudou a été reconnu comme religion officielle au Bénin en 1989 et gagne en popularité avec environ 17 pour cent de la population qui le suit. Une semaine d’activités centrée autour du culte du vaudou culmine le 10 janvier lorsque des gens de tout le Bénin ainsi que du Togo et du Nigeria se rendent dans la ville pour le festival annuel du vaudou. (Photo de Dan Kitwood/Getty Images)

LES EFFETS DE LA COLONISATION

Il est également important de noter que cette illusion peut être vue comme une illusion qui aurait été imposée par le colonisateur au nom d’une autre religion. A travers ce que l’on appelle « l’inculturation », une culture de la peur a été implantée dans la psyché du colonisé. On lui a appris à détester, ce qu’il avait de plus cher en lui, son esprit spirituel, ses divinités, ses croyances. Or le vaudou était considéré comme une religion de repère pour un grand nombre de ses adeptes. Outre sa dimension spirituelle, le vaudou a également une dimension sociale. Il rassemble à travers des tribus, des cultures et des familles ethniques.

En conclusion, peut-on donc parler d’un réel regard critique, ou d’une simple ignorance ?

Si ce n’est pas déjà fait, je vous invite à vous poser cette question car pour moi, l’ignorance n’est pas un défaut, au contraire. C’est ce que l’on fait de celle-ci qui m’importe. Elle peut ouvrir des portes qui jusque-là n’avaient encore jamais été ouvertes. Il est également important de souligner que cette tradition se repose sur une quête identitaire. Par identitaire, j’entends notre identité en tant que personne d’origine africaine. L’initiation peut se faire personnellement,notamment avec une méditation sur ces 4 questions proposées par l’historien Gabin Djimassé.

  1. D’où venons-nous ?
  2. Qui sommes-nous ?
  3. Ou sommes-nous ?

La réponse à ces 3 questions vous mènera vers une question un peu plus personnelle,

      4.  Ou allons-nous ?

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